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L’histoire de la croix de guerre, une distinction qui a connu bien des remous

croix de guerre
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La croix de guerre, cette décoration emblématique de la bravoure française, a une histoire aussi riche que mouvementée. Née dans les tranchées de la Première Guerre mondiale, elle a traversé le siècle en s’adaptant aux conflits et aux régimes, non sans soulever des débats passionnés. Retraçons l’épopée de cette médaille qui a orné la poitrine de nos héros et qui continue de fasciner les collectionneurs et les historiens.

Des origines fermement ancrées dans un contexte de guerre

Rappelez-vous la France de 1914, plongée dans une guerre d’une ampleur sans précédent. Nos soldats se battent avec courage, mais comment reconnaître leur bravoure ? C’est là que le bât blesse. Contrairement à nos voisins britanniques ou allemands, nous n’avons pas de distinction spécifique pour récompenser les actes héroïques en temps de guerre. La Légion d’honneur et la médaille militaire existent, certes, mais elles restent des récompenses exceptionnelles et rares.

C’est dans ce contexte que germe l’idée d’une nouvelle décoration. Le général Boëlle, dès l’automne 1914, propose la création d’une médaille pour accompagner les citations à l’ordre de l’armée. Mais c’est Maurice Barrès, l’écrivain nationaliste, qui va véritablement porter le projet sur la place publique. Dans les colonnes de L’Action française, il réclame avec ferveur « une médaille de bronze pour les braves ». Son appel ne reste pas lettre morte.

Le 23 décembre 1914, une proposition de loi est présentée à la Chambre des députés. C’est le lieutenant-colonel Driant, figure héroïque qui trouvera la mort à Verdun, qui évoque pour la première fois le terme de croix de guerre. L’idée fait son chemin, et le 4 février 1915, le projet est adopté. La croix de guerre est née, destinée à commémorer « les citations individuelles des officiers, sous-officiers, caporaux et soldats des armées de terre et de mer à l’ordre de l’armée, des corps d’armée, des divisions, des brigades et des régiments. »

La création de la croix de guerre 1914-1918

Le 8 avril 1915, la loi instituant la croix de guerre est promulguée. Mais saviez-vous que sa forme actuelle n’était pas celle initialement prévue ? C’est le sénateur Murat qui suggère de lui donner la forme d’une étoile, pour la distinguer de la croix de fer allemande. Quant au ruban, il reprend les couleurs de la médaille de Sainte-Hélène, un clin d’œil à l’épopée napoléonienne.

La croix de guerre 1914-1918 va rapidement devenir un symbole fort. Elle se distingue par un ingénieux système d’étoiles et de palmes fixées sur le ruban, qui indiquent le niveau hiérarchique de la citation justifiant l’attribution de la médaille. Chaque insigne a sa propre signification.

  • L’étoile de bronze évoque une citation à l’ordre du régiment ou de la brigade.
  • L’étoile d’argent correspond à une citation à l’ordre de la division.
  • L’étoile de vermeil accompagne la citation à l’ordre du corps d’armée.
  • La palme de bronze est réservée aux citations à l’ordre de l’armée.
  • La palme d’argent est octroyée pour cinq citations à l’ordre de l’armée.

Cette décoration connaît un succès fulgurant. À la fin de la guerre, plus de 2 millions de citations ont été attribuées, pour un total de 1,2 million de croix de guerre décernées. Elle n’est pas réservée qu’aux militaires : des civils, des femmes, et même des animaux en sont décorés ! Le pigeon Vaillant, qui a accompli son devoir jusqu’à l’asphyxie en apportant le dernier message du commandant Raynal assiégé dans le fort de Verdun, en est un exemple touchant.

La croix de guerre devient rapidement un symbole de fierté nationale. On la retrouve partout : sur les monuments aux morts, les insignes d’associations d’anciens combattants, et même dans l’artisanat des tranchées. Elle incarne la bravoure du poilu français et inspire d’autres pays qui créent leur propre version, comme la Belgique dès 1915, suivie du Portugal, de la Grèce et de la Tchécoslovaquie.

L’évolution de la croix de guerre pendant l’entre-deux-guerres

La Grande Guerre est terminée, mais l’histoire de la Croix de guerre ne s’arrête pas là. En 1921, une décision importante est prise : la décoration est étendue aux théâtres d’opérations extérieurs (T.O.E.). Vous vous demandez peut-être pourquoi ? C’est simple : la France est engagée dans des opérations militaires en Syrie, au Maroc, et ailleurs dans son empire colonial. Il fallait un moyen de récompenser la bravoure de nos soldats sur ces terrains lointains.

La Croix de guerre des T.O.E. se distingue par son ruban, qui arbore des bandes verticales rouges. Elle devient rapidement un objet de convoitise pour les militaires en service outre-mer. Mais ce n’est pas tout ! La Croix de guerre acquiert une charge symbolique encore plus forte. Elle n’est plus seulement une décoration individuelle, elle devient un symbole collectif.

En effet, savez-vous que près de 3 000 villes et collectivités publiques se sont vu attribuer la Croix de guerre ? C’est une manière de reconnaître les souffrances endurées par ces communautés pendant le conflit. Reims, Verdun, Dunkerque… autant de noms qui résonnent dans notre mémoire collective et qui portent désormais ce symbole de courage.

La croix de guerre 1939-1945

Le 3 septembre 1939, la France entre à nouveau en guerre. Naturellement, la question de la croix de guerre se pose. Le 26 septembre 1939, un décret-loi institue la croix de guerre 1939. Les modalités d’attribution sont similaires à celles de 1914-1918, mais le ruban change : il arbore désormais cinq bandes rouges sur fond vert.

Mais l’histoire va prendre un tournant dramatique. La défaite de juin 1940 plonge la France dans le chaos. Et c’est là que survient un scandale qui va entacher la réputation de la croix de guerre : des attributions abusives. Imaginez un peu : des officiers qui s’auto-décorent, des croix distribuées à tour de bras pour masquer l’ampleur du désastre… C’est un véritable camouflet pour tous ceux qui ont gagné leur décoration au prix du sang.

Ce scandale entraînera des conséquences durables. Il alimentera les débats sur la valeur réelle de la décoration et conduira à des révisions douloureuses après la guerre. Certains iront même jusqu’à remettre en cause l’existence même de la croix de guerre.

Les remaniements sous le régime de Vichy

Le régime de Vichy, dans sa volonté de rompre avec la IIIe République, s’attaque aussi aux symboles. Le 28 mars 1941, la croix de guerre 1939 est abrogée. Mais ce n’est pas la fin de l’histoire ! Une nouvelle version est créée, avec un ruban modifié : les bandes rouges sont remplacées par des bandes noires.

Ce changement n’est pas anodin. Il reflète la volonté du régime de Vichy de marquer sa différence, tout en conservant un symbole fort de la bravoure militaire. Le gouvernement de Vichy entreprend une vaste opération de révision des attributions. Les motivations sont multiples :

  • corriger les abus de l’été 1940 ;
  • récompenser les actes de bravoure oubliés dans la confusion de la défaite ;
  • retirer la décoration à ceux jugés « indignes » par le nouveau régime ;
  • affirmer l’autorité du gouvernement de Vichy sur les forces armées ;
  • utiliser la croix de guerre comme outil de propagande pour la « Révolution nationale ».

Cette révision est un exercice périlleux. Comment juger, a posteriori, de la légitimité d’une attribution ? Comment ne pas céder à la tentation de l’épuration politique ? Ces questions vont hanter l’administration de Vichy et laisser des traces durables dans l’histoire de la décoration.

La croix de guerre et la France Libre

Pendant que Vichy remanie la croix de guerre, le général de Gaulle, depuis Londres, ne reste pas inactif. Comment récompenser les actes de bravoure des Forces Françaises Libres sans une décoration officielle ? C’est ainsi que le 29 janvier 1941, de Gaulle crée une citation à l’ordre des Forces Françaises Libres. Un acte symbolique fort, qui affirme la continuité de la France combattante.

Le 7 janvier 1944, par une ordonnance, de Gaulle rétablit la croix de guerre 1939. C’est un coup double : il efface les décisions de Vichy et réaffirme la légitimité de la France Libre. Mais il va plus loin encore. Il institue une citation à l’ordre de la Nation, la plus haute distinction, symbolisée par une palme de vermeil sur le ruban. C’est une innovation majeure qui perdure encore aujourd’hui.

L’héritage et les polémiques

La Libération ne met pas fin aux débats autour de la croix de guerre. Au contraire ! Les polémiques font rage. Certains remettent en question la valeur même de la décoration, arguant qu’elle a été galvaudée par les attributions abusives. D’autres défendent farouchement son prestige.

Ces débats ne sont pas anodins. Ils touchent à des questions fondamentales : comment honorer justement le courage ? Comment éviter les dérives ? La croix de guerre devient le miroir des tensions de l’après-guerre. Les controverses sur les attributions pendant l’Occupation sont particulièrement vives. Qui mérite vraiment cette décoration ? Les résistants de la première heure ? Les soldats de l’armée d’armistice qui ont rejoint la Résistance ? Les questions sont complexes et les réponses, souvent douloureuses.

Malgré ces débats, la croix de guerre garde une place centrale dans la mémoire collective française. Elle incarne le courage, le sacrifice, mais aussi les zones d’ombre de notre histoire. C’est peut-être là que réside sa force : dans sa capacité à cristalliser les contradictions de notre passé.

La croix de guerre aujourd’hui

Vous pensez peut-être que la croix de guerre appartient au passé ? Détrompez-vous ! Elle est toujours bien vivante. Lors de la guerre du Golfe en 1991, elle a été attribuée à des unités françaises engagées dans le conflit. Un signe que cette décoration centenaire sait s’adapter aux guerres modernes.

Mais au-delà de son utilisation militaire, la croix de guerre conserve une forte charge symbolique. Elle reste un objet de fascination pour les collectionneurs, les historiens, et tous ceux qui s’intéressent à notre histoire militaire.

  • Elle incarne la reconnaissance de la Nation envers ses héros.
  • Elle témoigne de l’évolution des conflits au XXe siècle.
  • Elle reste un symbole fort dans les cérémonies commémoratives.
  • Elle inspire encore la création de décorations dans d’autres pays.
  • Elle suscite des débats sur la manière de récompenser le courage dans les conflits modernes.

Aujourd’hui, le défi est de maintenir la valeur et l’importance de la croix de guerre. Comment conserver son prestige à l’ère des conflits asymétriques et des opérations spéciales ? Comment l’adapter aux nouvelles formes de courage, comme la lutte contre le terrorisme ? Ces questions montrent que l’histoire de la croix de guerre est loin d’être terminée. Elle continue d’évoluer, reflet de notre rapport complexe à l’héroïsme et à la mémoire des conflits.

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